Votre Altesse Sérénissime, cher Prince Albert II de Monaco,
Excellence, Monsieur le Ministre d’État, cher Pierre Dartout,
Éminences,
Excellences,
Bien chers Pères,
Mesdames et Messieurs,
C’est toujours pour nous un immense honneur et une grande joie d’être reçu en cette belle Principauté de Monaco. Nous ne pouvons ici qu’évoquer les liens les meilleurs qui nous ont unis dès la première année de notre élection avec la Principauté en la personne de feu votre père, le regretté Prince Rainier et ces liens n’ont fait que se renforcer depuis vos prises de fonction à la tête de ce Rocher historique.
Comme vous le savez, nous sommes profondément attachés aux valeurs qui animent votre engagement en faveur de l’environnement et du développement durable. Nous ne pouvons que nous féliciter de votre volonté de faire de la Principauté un pays producteur de modèles : modèle de vie, modèle de développement, modèle de bien-être, modèle de paix et d’ouverture qui servent aux renforcements de l’harmonie mondiale. Ces valeurs fondamentales héritées, comme vous le rappelez souvent, de la Grèce, de Rome et du christianisme, sont un héritage commun, et le fondement qui font de Monaco un pays exemplaire, prospère et respectueux des valeurs de dignité, modèle aussi pour son respect de la nature, pour sa créativité et son intelligence.
Dans cette perspective, nous voudrions rappeler ici que le Patriarcat œcuménique sous l’impulsion qu’il a reçue de notre prédécesseur le Patriarche œcuménique Dimitrios, n’a de cesse d’œuvrer pour une alliance entre l’écologie contemporaine, en tant que recherche scientifique pour la protection et la survie de l’environnement naturel, et la théologie, en tant que réflexion métaphysique sur des sujets religieux. Cette alliance est plus que jamais nécessaire pour cerner la profondeur spirituelle des questions cruciales de notre temps. C’est pourquoi nous ne cessons de promouvoir l’idée quant à la nécessité d’une solution interdisciplinaire et collaborative de ces défis auxquels notre planète fait face aujourd’hui. Vous avez d’ailleurs constamment fait valoir notre vision commune en faveur de la protection de l’environnement en nous honorant du Premier Prix de la Fondation Cardinal Paul Poupard lors de notre visite en Principauté il y a déjà plus de dix ans.
Nous touchons ici à la spécificité de la spiritualité chrétienne qui se différencie dans le contexte de la crise environnementale actuelle des mouvements écologistes contemporains. La différence ne réside pas tant dans le degré de volonté quant à la préservation et la protection des ressources naturelles du monde, ce fait doit être la priorité de chaque personne que ce soit des responsables politiques ou de simples citoyens. La différence – ou la spécificité chrétienne – réside dans notre conception du monde, et non dans le but recherché face à cette démarche. La définition de l’humanité comme « économe » et « prêtre » de la création est marquée par un sens profond de justice et de modération. Nous sommes donc appelés à préserver la création en servant son Créateur.
Votre Altesse Sérénissime, qui mieux que vous peut parler de l’état de notre planète ? Vous qui l’avez tant parcouru d’un pôle à l’autre, surpassant les exploits de Pythéas et alertant l’opinion mondiale dès 2006 sur l’irréversibilité des changements que vous y aviez déjà constatés. Le changement climatique, la biodiversité et l’exploitation de l’eau sont vos axes d’action et par votre fondation vous ne cessez de déployer une énergie qui ne peut être vaine.
La tradition des Pères Grecs définit l’activité de l’humanité qui se joint à celle de son créateur en tant que synergie. Elle est innée et latente en chaque personne, car si Dieu a créé le monde pour y habiter par sa grâce, il a dressé l’humanité comme une tente qui doit abriter la gloire du Dieu vivant. L’actuelle crise écologique et environnementale détruit cette possibilité. Le désastre de cette nouvelle ère dont l’issue pour l’humanité semble incertaine est semblable à la destruction de l’image de Dieu, mais également l’anéantissement de son environnement, ce paradis où Dieu plaça Adam pour qu’il le cultivât et en prît soin. Il dépend donc de nous de cultiver notre jardin et de le cultiver, car l’humanité est comparée par le psalmiste à un arbre au feuillage verdouaillant, irrigué par les flots de la grâce et de sa conscience éthique en une admirable synergie ?
À notre humble mesure, nous sommes nous aussi engagés avec la même énergie dans cette entreprise commune, difficile certes, mais rendue d’autant plus nécessaire que cette année semble avoir été marquée par tous les records en matière de dérèglement climatique. Il n’y a de solution à la crise environnementale dans laquelle nous nous trouvons que si nous acceptons de transformer nos manières de vivre. C’est la fameuse metanoia, conversion du cœur, dont parlent si souvent les Pères de l’Église. Elle est avant tout la redécouverte d’un chemin de charité. Car, ainsi que le dit notre Seigneur Jésus-Christ dans l’Évangile selon Saint Matthieu : « dans la mesure où vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. » (Mt. 25, 40)
Nous vous redisons avec infinie gratitude toute notre joie d’être parmi vous aujourd’hui. Nous savons votre soutien et votre attention à l’égard du Patriarcat œcuménique et vous remercions tout particulièrement Son Excellence, le Ministre d’État Monsieur Pierre Dartout pour l’organisation de cette généreuse rencontre. Permettez-nous d’exprimer notre reconnaissance à Votre Altesse Sérénissime pour votre hospitalité et le soutien constant que vous manifestez à l’égard des orthodoxes de la Principauté.
Merci de votre accueil et nous levons notre verre à votre santé et à celle de tous les Monégasques.